L'évaluation des préjudices immatériels : Un enjeu majeur

IMMATEXL'évaluation au cas par cas

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Newsletter du 3ème trimestre 2024

22/09/2024

Préambule


Le préjudice professionnel futur de la victime, est indemnisé à travers deux postes prévus par la nomenclature Dintilhac :  


-    Les Pertes de Gains Professionnels Futurs (PGPF)
-    L’Incidence Professionnelle

 

Les PGPF correspondent aux pertes de revenus supportées par la victime ayant perdu son emploi ou contraint à une activité partielle jusqu’à son départ à la retraite.


La perte de droit à la retraite que la victime va devoir supporter en lien avec cette perte de ses revenus relève en général de l’incidence professionnelle.


L’évaluation de la perte de droit à la perte de retraite se fait par différentiel entre le calcul de la retraite à laquelle la victime aura droit et celui de la retraite à laquelle elle aurait eu droit en l’absence d’accident.


Ce calcul différentiel concerne aussi bien pour la retraite CNAV que la retraite complémentaire.


Trois facteurs vont déterminer le calcul :

 

-  La perte de gain professionnel futur (PGPF)
- L’âge de départ à la retraite
 - Le choix du barème de capitalisation parmi ceux proposés par la Gazette du Palais

 

Sur le calcul d’une retraite CNAV


La retraite CNAV est fonction 

 

du revenu de base qui est calculé sur la moyenne des 25 meilleurs revenus de la carrière
du nombre de trimestres acquis
du nombre de trimestres requis 
de la décote éventuelle si le nombre de trimestre requis n’est pas atteint.

 

Sur le calcul d’une retraite complémentaire

 

La retraite complémentaire est calculée en fonction du nombre de point acquis.

 

Sur les pertes de gains professionnels futures ( PGPF)

 

Le calcul des PGPF est un élément déterminant de l’évaluation des pertes de droit à la retraite.

 

Les PGPF vont permettre de calculer le revenu de base des 25 meilleures années pour le calcul de la retraite CNAV qu’aurait perçu la victime en l’absence d’accident, ou le nombre de points qui auraient été acquis pour l’évaluation de la retraite complémentaire.


Les PGPF ne peuvent être capitalisées en rente viagère, car, sinon, la perte de droit à la retraite constituerait une double indemnisation.

 

Sur l’âge de départ à la retraite


L’âge de départ à la retraite va déterminer le montant de la retraite et le coefficient de capitalisation en rente viagère à retenir dans les tables de la Gazette du Palais.


L’âge de départ à 67 ans, qui pourra être demandé pour bénéficier d’une retraite CNAV à taux plein, ne sera pas forcément retenu en raison de la pénibilité du travail de la victime. 
Il y aura lieu de déterminer contradictoirement l’âge probable de départ à la retraite.

 

Sur le choix de la table de capitalisation


La Gazette du Palais a édité en 2022 des barèmes de capitalisation pour des hommes et des femmes avec des taux d’actualisation à hauteur de 0% et de 1%.


Les coefficients de capitalisation pour les hommes et les femmes diffèrent selon l’espérance de vie de chacun.


Le taux d’actualisation traduit l’écart qu’il y a entre le taux de placement sans risque et l’inflation. 


Si l’inflation est supérieure au taux de placement sans risque, le taux d’actualisation sera négatif, ce qui augmentera le coefficient de capitalisation.


Ainsi, pour un homme qui partirait à 65 ans ne retraite, le coefficient de capitalisation en rente viagère est de 21.437 si le taux d’actualisation est de -1%, et de 18.949 si le taux d’actualisation est de 0%, soit un écart de  13% par rapport au coefficient le plus petit.

 

Points de vigilance


Il y aura lieu de définir l’âge probable de départ à la retraite et de choisir le barème de capitalisation de la Gazette du Palais en fonction des taux de placement et d’inflation.


La perte des droits à la retraite sera calculée en fonction des PGPF qui ne peuvent être capitalisées en rente viagère car, sinon, il y aurait alors double indemnisation.

Newsletter du 2ème trimestre 2024

22/09/2024

Préambule


Avec André Belmas, expert financier, nous nous sommes interrogés sur la fiche n°5 « Comment réparer le préjudice moral d’une société » rédigée par la Cour d’Appel de Paris.
Cette fiche précise qu’une société est en droit, selon les articles du Code Civil, de présenter une réclamation sur le fondement du préjudice moral.


Elle ajoute que, si le juge est souverain en matière de préjudice moral, il doit cependant s’appuyer sur des données économiques pour l’apprécier.


Il y a donc lieu d’apporter un éclairage économique sur la valorisation du préjudice moral de la société.


Pour cela il faut :

 

  •    Caractériser le préjudice moral
  • Décrire l’impact du préjudice moral sur la marche de la société ;
  •   Évaluer l’impact économique.

 

Caractériser le préjudice moral


La fiche n°5 précise qu’un préjudice moral d’une société peut revêtir principalement deux aspects : 

 

L’un externe affectant la perte d’image et de réputation de la société;

L’autre interne affectant la perte de confiance de son personnel en l’entreprise

 

Une concurrence déloyale ou une contrefaçon peuvent entraîner une perte d’image et/ou une perte de confiance.

 

Un sinistre peut aussi être à l’origine de cette perte de réputation ou perte de confiance. 


Par exemple, un arrêt d’activité prolongé ou une marche dégradée qui obère le niveau de qualité des produits peuvent entraîner une perte de confiance.

 

Il y a lieu  de décrire les évènements qui ont conduit à la naissance d’un préjudice moral et de caractériser celui-ci.

 

Il conviendra  de justifier l’existence d’un préjudice moral avec des éléments factuels tels que :


-    Pour la perte d’image : commentaires et notations sur les réseaux sociaux, sondage clientèle et prospects effectués par un organisme indépendant, classement de la marque dans les organismes et publications  professionnelles et organisations de consommateurs…
-    Pour la perte de confiance du personnel : augmentation du turn-over du personnel, du nombre d’arrêts de travail, du nombre de jours de grèves…

 

Décrire l’impact économique sur la marche de la société

 

La perte de réputation peut en premier lieu entrainer une perte de clientèle.

 

Une perte de réputation peut aussi fragiliser la société, rendre critique sa rentabilité et aller jusqu’à la mise en redressement judiciaire voire un dépôt de bilan.

 

Il y a lieu  de vérifier le lien de causalité entre l’impact économique ainsi décrit et la perte de réputation alléguée. Il sera notamment vérifié s’il n’y avait pas de signes avant-coureurs d’une perte de clientèle avant.

 

La perte de confiance peut entraîner un taux accru des démissions, et une difficulté à recruter.

 

Évaluer l’impact économique


Pour une perte d’image, il y aura lieu d’évaluer par exemple la perte de chiffre d’affaires, la perte de marge ou la perte de la valeur de l’actif net du fonds de commerce.


Pour la perte de confiance, il y aura lieu d’évaluer par exemple les frais supplémentaires de recrutement, la perte de productivité.


La difficulté sera de mesurer précisément l’impact du seul préjudice moral qui n’aurait pas déjà été pris en compte dans l’analyse du préjudice économique lié aux évènements (concurrence déloyale, sinistre...) ayant conduit à une perte d’image ou de confiance.

 

Point de vigilance


L’analyse du préjudice moral sous l’angle de la fiche n°5 s’apparente à l’analyse d’un préjudice économique en lien avec une perte d’image et/ou de confiance.
Il y a lieu d’apporter la preuve de cette perte d’image et/ou de confiance, et d’en décrire l’impact économique.


Le préjudice qui en résulte aura pu être déjà pris en compte dans l’analyse du préjudice lié aux évènements ayant entraîné une perte d’image ou de confiance.

Newsletter 3ème trimestre 23

30/06/2023

Newsletter 3ème trimestre 23

La difficulté d’évaluer une perte d’exploitation d’une jeune entreprise ou d’une startup est que nous ne disposons pas d’historique pour établir une situation contrefactuelle (situation sans sinistre).


Face à cette absence d’historique, plusieurs outils peuvent nous aider :

 

-   L’étude de marché
-    L’analyse des facteurs clés de succès
-    Le Business Plan

 

Avant de démarrer son activité, la jeune entreprise aura réalisé une étude de marché, puis défini l’offre de produit ou  de service et identifié les facteurs clés de succès avant d’établir un Business Plan avec un prévisionnel de chiffre d’affaires.


Etude de marché


L’étude de marché permet de cerner le marché sur lequel se lance l’entreprise.


Elle répond aux questions suivantes : quels sont les clients ? Quelle est la demande en matière de produits et de services ? Quels sont les concurrents ? Quelle est la tendance ?


Elle décrit ensuite précisément les différentes attentes des clients, et les éventuelles insatisfactions actuelles.


Elle identifie enfin les concurrents et leurs offres.


L’ordre des Experts-comptables dispose d’une base de données intéressantes qui analyse les données du marché de plusieurs secteurs d’activité. C’est une source intéressante d’information pour faire une étude de benchmarking.


Les facteurs clés de succès


Les facteurs clés de succès, dénommés aussi facteurs de différenciation, sont les éléments sur lesquels l’entreprise s’appuie pour s’implanter sur le marché.


Quelques exemples de facteurs clés de succès : emplacement pour un commerce, compétences professionnelles, brevet, réseau pour une entreprise de conseil, etc..


L’expert financier devra apprécier la situation de l’entreprise en regard de ces facteurs clés de succès.


Le profil du chef d’entreprise est aussi un facteur-clé de succès important.


Business Plan


 Le Business Plan est un passage obligé pour la création d’une entreprise. A partir de l’étude de marché, le Business Plan

 

-     définit les offres de produits et de services;
-    détermine un chiffre d’affaires prévisionnel ;
-    précise les moyens à mettre en œuvre pour réaliser ce chiffre d’affaires
-    établit un compte de résultat prévisionnel, et donc une marge sur coûts variables.

 

Le Business Plan permet aux banques d’apprécier la rentabilité avant de proposer un emprunt pour financer le lancement de l’activité. 


Il doit cependant être examiné avec un œil critique car certains chefs d’entreprise peuvent ‘prendre leurs désirs pour des réalités’.


Le profil du chef d’entreprise sera, là aussi, un élément important d’appréciation.


L’expert financier devra apprécier la pertinence de ce Business Plan au regard du sérieux de l’analyse présentée, ou par une analyse de benchmarking.


L’évaluation de la perte d’exploitation d’une jeune entreprise traditionnelle


L’expert financier doit maintenant évaluer la probabilité de la chance de réaliser le business plan.


Il s’appuiera, pour cela, bien sûr, sur le sérieux et la cohérence de l’étude de marché et du Business Plan, des études qui existe par secteurs d’activité, notamment des études publiées par l’ordre des Experts-Comptables.


Il s’appuiera aussi et surtout sur l’analyse des facteurs clés de succès de l’entreprise en rapport avec la réalité de celle-ci, et notamment sur le profil du chef d’entreprise.


Si le facteur clé de succès est lié à des compétences professionnelles, l’expert financier s’attachera par exemple à évaluer la réalité de ces compétences (expérience, formation, etc..).


Ou, si le facteur clé de succès est lié à l’emplacement, l’expert financier fera une analyse précise de l’environnement d’implantation de l’entreprise et de son évolution.


Particularité d’une startup


Une startup n’est pas une entreprise traditionnelle. 


Elle se positionne sur un marché innovant avec un potentiel de croissance dont les risques sont difficiles à évaluer.


Elle doit passer par une phase d’expérimentation avant de devenir une entreprise traditionnelle.


Aucune étude de benchmarking n’est évidemment disponible, d’où une difficulté accrue pour établir une situation contrefactuelle.


Pour évaluer la probabilité de chance de réalisation du business plan, la personnalité du chef d’entreprise est un élément prépondérant à prendre en compte.

 

Points de vigilance


Pour pallier l’absence d’historique, l’expert financier peut s’appuyer sur des études de benchmarking et sur le business plan en y apportant toutefois un regard critique.


Il évaluera la probabilité de chance de la réalisation du business plan en regard de l’analyse des facteurs clés de succès qu’il aura identifié, et du profil du chef d’entreprise.


Dans le cas d’une startup, aucune étude de benchmarking n’est disponible, ce qui rend la construction de la situation contrefactuelle, compliquée et renforce l’importance du profil du chef d’entreprise. 

Newsletter du 2ème trimestre 2023

31/03/2023

Newsletter du 2ème trimestre 2023

Le développement des modèles de langage comme CHatGPT fait depuis quelques mois la « une » des journaux.

 

Ces nouveaux modèles de langage vont-ils faire évoluer l’expertise en matière d’évaluation de perte d’exploitation ?


Qu’est-ce qu’un modèle de langage


Yann Le Cun, Directeur de la recherche fondamentale de l’intelligence artificielle du Groupe Facebook, puis du Groupe Meta, écrit :


« Les grands modèles de langage tels que ChatGPT sont « autorégressifs » : à partir d’un corpus de mots, jusqu’à 1 400 milliards de mots pour les systèmes les plus performants, le modèle prédit le dernier mot d’une séquence, celui qui doit venir ensuite dans une phrase donnée. »


L’intelligence artificielle est ainsi conçue pour modéliser les capacités cognitives humaines et automatiser certaines tâches.


Très succinctement, on peut dire qu’un modèle de langage construit une phrase à partir d’une large base de données en choisissant les mots ou les corpus de mots, appelés aussi « tocken », les plus probables. 


Le modèle de langage peut ensuite devenir un « robot conversationnel ».

 

Les métiers qui seraient affectés par ces modèles de langage


La presse cite plusieurs métiers qui pourraient changer, voire disparaitre avec l’avènement de ces modèles de langage.


Les agents immobiliers utilisent déjà ces modèles de langage comme outil d’aide pour la rédaction des actes.


Le métier de télévendeur pourrait considérablement évoluer car le modèle de langage peut générer un argumentaire en réponse aux questions des clients.


Pour les enseignants, le modèle de langage peut devenir un assistant pédagogique pour les aider à préparer leur cours, à varier les énoncés d’examens. Mais aussi à aider les élèves à se rendre compte des limites du robot conversationnel en réfléchissant à ce qu'ils auraient pu apporter de plus à la réponse du modèle de langage avec leur propre connaissance.

 

Le métier de médecin généraliste, selon l’académie de médecine, pourrait aussi évoluer et utiliser les modèles de langage comme aide à la décision avec une sortie de diagnostics automatisée établis à partir de bilans biologiques, ou d’imagerie.

 


Qu’en est-il de l’apport d’un modèle de langage sur l’évaluation d’un préjudice économique ?


Pour évaluer un préjudice économique, il faut comprendre l’activité concernée, et décrire l’impact du sinistre sur cette activité avant d’évaluer le préjudice.


Quel peut-être l’apport d’un modèle de langage dans ces trois processus ?


Comprendre : la compréhension de l’activité passe par une recherche d’informations sur cette activité sous forme d’enquête notamment.


Bien entendu, tout de qui peut être perçu au cours de la phase d’enquête grâce à l’écoute et l’intuition ne peut être collecté par un modèle d’intelligence artificielle (et heureusement !).


En revanche, l’intelligence artificielle peut aider à la recherche d’information sur l’environnement économique avec toutefois des limites.


Par exemple, pour évaluer une perte d’exploitation d’un chalutier, il y a lieu de connaitre les espèces de poissons soumises à quota. Une recherche par ChatGPT s’est révélée plus rapide que celle d’un moteur de recherche classique, mais a dû être vérifiée car elle comportait des imprécisions. 


Et, dans le cas d’une perte d’exploitation d’une boulangerie dans un secteur qui a connu une fermeture d’une autre boulangerie, ChatGPT n’a pas été capable de fournir cette information.


Décrire : il s’agit ensuite de bien comprendre l’impact du sinistre sur les flux économiques de l’activité pour ne retenir que le préjudice économique ayant une relation causale avec le sinistre.


L’arrêt d’une IRM, par exemple, dans un cabinet de radiologie n’entraîne pas nécessairement une perte de chiffre d’affaires car les rendez-vous annulés ont pu être reportés. Il sera alors plus pertinent d’évaluer le préjudice économique en perte de chance.


Il est peu probable que ce type d’analyse puisse être automatisée par un modèle de langage.


Evaluer : ce processus concerne principalement l’analyse des données comptables (chiffre d’affaires, des taux de marge, économies de charges fixes, frais supplémentaires…).
Excel est un logiciel très performant qui permet d’automatiser certaines analyses.


Un modèle de langage ne devrait pas être d’une aide particulière pour l’analyse des données de chiffres.

 

Synthèse


Aujourd’hui, les modèles de langage comme ChatGPT peuvent contribuer à la récolte des informations sur l’environnement de l’activité affectée par un sinistre, sous réserve d’être contrôlées.


Les apports de ces modèles de langage paraissent toutefois, à ce jour, limités pour l’expertise Perte d’Exploitation qui nécessite très souvent une analyse au cas par cas et où l’écoute et l’intuition sont essentielles.

Newsletter 1er trimestre 2023

31/12/2022

Newsletter 1er trimestre 2023

Les conséquences d’un incendie sur une exploitation laitière


Un incendie peut détruire un stockage d’alimentation, des bâtiments, du matériel agricole.


Les conséquences financières, hors dommages matériels, qui en découlent sont la perte de fourrage et la sous-traitance de travaux à des tiers.


L’incendie peut également induire un stress du cheptel, avec des conséquences directes et indirectes.


Les vaches qui se trouvent à proximité de l’incendie ont pu inhaler des fumées et être asphyxiées. Les vaches peuvent se mettre à courir pour fuir l’incendie, ce qui peut donner lieu à des boiteries et à des réformes.


La désorganisation des bâtiments peut aussi influer sur le bien-être animal avec notamment la diminution de l’espace disponible de la stabulation.


Ce stress peut entraîner des conséquences sur

 

1. La baisse de production laitière individuelle 
2. une désorganisation du cheptel par une baisse de la fertilité 
3. une surmortalité des veaux liée à la baisse de la qualité du colostrum
4. Surcoût des frais d’alimentation et d’élevage des vaches

 

 

La question du lien de causalité


Si le lien de causalité du sinistre avec les pertes de fourrage, la sous-traitance, et les réformes peut être facilement établi, il n’est est pas de même pour les autres conséquences susvisées.


La question du bien-être animal est un point clé.


Il y aura lieu de bien décrire les conditions de vie des animaux avant et après l’incendie.


Mais au-delà de ces constats physiques facile à établir, l’état sanitaire du troupeau avant et après sinistre devra être investiguer pour voir si une éventuelle perte de production laitière ne serait pas dû à un état infectieux antérieur au sinistre par exemple.


L’appui d’un expert vétérinaire peut se révéler nécessaire pour déterminer si les conséquences éventuelles que constituent la baisse de production laitière, la désorganisation du cheptel, la surmortalité des veaux ou les surcoûts d’élevage et d’alimentation sont bien en lien avec le sinistre.


Une grille de lecture qui facilite l’évaluation de la perte d’exploitation.


La méthode classique de l’analyse de la perte de marge brute risque d’entraîner l’omission de certains postes de produits ou de charges.
La grille des gains et pertes suivante facilitera la prise en compte de tous les facteurs susnommés pour l’évaluation de la perte d’exploitation :


Gains                                                                                                                                               Pertes


Produits en plus                                                                                                                       Produits en moins


                                                                                                                                                            Perte fourrage
                                                                                                                                                           Réforme
                                                                                                                                                           Perte de production laitière
                                                                                                                                                            Désorganisation du cheptel
                                                                                                                                                            Surmortalité des veaux

 

Perte en moins                                                                                                                         Perte en plus

 

Charges variables                                                                                                                    Frais d’alimentation
                                                                                                                                                             Frais d’élevage
                                                                                                                                                             Travaux sous-traités à des tiers


Autres points de vigilance 


L’analyse classique de la perte de marge de production laitière par vache n’est pas pertinente en raison des variations du prix du lait. On s’attachera à raisonner sur les quantités.
Une augmentation des travaux de sous-traitance par rapport à une moyenne des trois dernières années peut occulter un changement de politique de sous-traitance des travaux agricoles. Une analyse de l’évolution de la sous-traitance par type de travaux  est nécessaire.

Newsletter 4ème trimestre 2022

30/09/2022

Newsletter 4ème trimestre 2022

Préambule


Rappelons qu’une perte de chance peut être définie comme la disparition certaine du fait d’un tiers d’une éventualité favorable d’une chance d’obtenir un gain ou de la chance de limiter une perte.


L’indemnisation ne peut être égale à la totalité du gain manqué ou de la perte mais se limite à une somme correspondant à la seule chance perdue.


Pour évaluer le préjudice lié à une perte de chance, il faut :

 

-     Etablir le caractère certain de la perte de chance par son lien de causalité avec le préjudice ;
-    Evaluer la totalité du préjudice ;
-    Estimer la probabilité de réalisation de la chance

 

 

Dans quel cas une perte d’exploitation peut-elle être analysée comme une perte de chance ?


Pour évaluer la perte de chiffre d’affaires, il faut ‘construire’ une situation virtuelle de référence qui correspond à la situation qu’aurait ‘probablement’ connue l’entreprise sans sinistre.


Si le scénario ainsi construit comporte peu d’aléa, la perte de chiffres d’affaires est quasi certaine ; on ne peut alors évoquer une perte de chance. Le préjudice est certain.


Il en est ainsi d’un commerce de boulangerie installé depuis des années dans un quartier qui n’a pas connu de changement dans son environnement.


Toutefois, l’environnement de l’entreprise est rarement aussi certain. Et, il existe en général plusieurs facteurs qui peuvent influer sur l’évolution du chiffre d’affaires.

 

Cette question est en général traitée par l’analyse des facteurs internes et externes qui conduisent à retenir une tendance pour le calcul de la perte du chiffre d’affaires.


L’analyse la perte de chiffre d’affaires comme un perte de chance peut compléter et éclairer l’analyse de la tendance.

 

Analyser la perte de chiffre d’affaires comme une perte de chance de ne pas avoir réalisé le chiffre d’affaires attendu en l’absence de sinistre permet en effet de vérifier le degré de lien de causalité entre le sinistre et l’évolution attendue du chiffre d’affaires.


Il peut effectivement y avoir d’autres facteurs extérieurs au sinistre qui peuvent expliquer une perte de chiffre d’affaires. 


Ceux-ci doivent être pris en compte pour une juste évaluation de la perte liée uniquement au sinistre. L’analyse de la perte de chiffre d’affaires sous l’angle de la perte de chance peut y aider.


Exemple d’un cabinet de radiologie


Un cabinet de radiologie investit dans une IRM qui connait des arrêts pendant plusieurs mois en raison de déclenchements répétitifs. Après réparation des désordres, le chiffre d’affaires de cette activité connait une progression.


Pendant la période de perturbation, des rendez-vous ont été annulés ou reportés.


La perte de chiffre de ce cabinet est composée :

 

-    De  la perte de chiffre d’affaires pour les rendez-vous qui ont été définitivement annulés
-    De la perte de chiffre d’affaires liée au développement de l’activité compromis par le sinistre  

 

La première perte de chiffre d’affaires est certaine. Il n’y a pas d’aléas.

 

En revanche, la deuxième perte de chiffre d’affaires peut être analysée comme une perte de chance de ne pas avoir connu le développement espéré en raison des arrêts répétés de l’IRM.


Pour évaluer le préjudice lié à une perte de chance, il faut :

 

-     Evaluer la totalité du préjudice possible ;
-    Estimer la probabilité de réalisation de la chance.

 

 

La totalité du préjudice possible peut se calculer sur la base d’une progression du chiffre d’affaires attendue qui conduit au niveau de chiffre d’affaires réalisé après la réparation des désordres et une période de récupération de la clientèle qui aurait déserté le cabinet.


La probabilité de la réalisation de ce chiffre d’affaires doit s’apprécier en fonction du lien de causalité entre la gêne occasionnée par ces pannes arrêts et l’absence de prise de rendez-vous.

 

Il y a donc lieu d’apprécier en quoi ces arrêts ont empêché la prise de rendez-vous ou entraîné leur annulation.

 

Les facteurs à prendre en compte sont notamment :


-    La fréquence des arrêts
-    Le caractère aléatoire de ces arrêts
-    La durée des arrêts
-    La situation concurrentielle du cabinet

 

Ainsi, si les arrêts sont peu fréquents et de courtes durées, s’ils ont un caractère prévisible et s’il n’existe pas de cabinet concurrent dans un environnement proche, la gêne occasionnée par ces arrêts pour la prise de rendez-vous est faible.


Il pourra alors être soutenu que la perte de chance de réaliser le chiffre d’affaires attendu est minime et être appliqué un faible pourcentage à la perte totale attendue de chiffre d’affaires calculée ci-dessus.


En revanche, si les arrêts sont fréquents, aléatoires, de longue durée et qu’il existe une autre IRM à proximité, le sinistre aura un lien prépondérant avec les difficultés de prises de rendez-vous et la perte de chance sera élevée.


Synthèse


Lors la construction du scénario de référence, l’expert financier doit s’interroger sur les facteurs qui influent sur la réalisation du chiffre d’affaires.


Lorsque le caractère certain du scenario de référence n’est pas établi, l’analyse de la perte d’exploitation sous l’angle de la perte de chance peut compléter l’analyse classique de la tendance.


Après avoir évalué la totalité du préjudice possible, l’expert appréciera le degré de chance de réalisation de ce scénario en l’absence de sinistre.


Cette appréciation qualitative se basera sur l’analyse des causes ayant concouru à la perte de chiffre d’affaires, de leurs liens de causalité avec le sinistre et de la prépondérance de chacune de ces causes dans la perte du chiffre d’affaires. 


Point de vigilance


Si le caractère certain du scénario de référence n’est pas établi, l’analyse de la perte de chiffre d’affaires sous l’angle de la perte de chance complète l’analyse classique de la tendance et permet une juste évaluation de cette perte aux seuls facteurs liés au sinistre.

Newsletter 3ème trimestre 2022

30/06/2022

Newsletter 3ème trimestre 2022

1.    Préambule


Dans certaines situations, ne pas tenir compte de la question de l’élasticité des prix peut entraîner des erreurs d’évaluation de pertes d’exploitation importantes. 


Qu’entend-on par ‘élasticité des prix’ ?


Dans un environnement concurrentiel, l’entreprise peut adopter une politique de prix qui lui permet d’influencer la demande, et jouer ainsi sur le phénomène d’élasticité du prix pour adapter cette demande.


Si le chiffre d’affaires est calculé en multipliant les quantités par le prix unitaire remise déduite, ne pas tenir compte du phénomène d’élasticité des prix peut conduire en effet à une évaluation erronée de la situation de référence, dénommée ‘situation contrefactuelle’.

 

Prenons l’exemple d’un parc d’attraction où le chiffre d’affaires est calculé en multipliant les entrées par le prix de vente.


Si, pendant la période de référence, l’entreprise a pratiqué des remises importantes pour augmenter le nombre d’entrées et que pendant la période de perturbation le prix de vente a augmenté, il serait erroné de retenir le nombre d’entrées de la période de référence pour calculer le chiffre d’affaires attendu s’il existe un phénomène d’élasticité du prix.

 

2.    Comment se mesure l’élasticité des prix’ ?


L'élasticité des prix mesure la sensibilité de la demande à la variation du prix.


Pour la mesurer, on calcule le ratio suivant :


Élasticité = Taux de variation de la demande / Taux de variation du prix.


En général, ce ratio est négatif.


En effet, en général, la demande diminue si le prix augmente.


Prenons l’exemple d’un ratio de -50%.


Cela signifie que si le prix augmente de 10%, la demande variera de -5% (=-50%*10%). A contrario si le prix diminue de 10%, la demande augmentera de 5% (=-50%*-10%)


Il arrive que ce ratio soit positIif. 


Dans ce cas, cela signifie que plus le prix augmente, plus la demande augmente. Cela concerne essentiellement des produits de luxe à la mode.


Rarement ce ratio est nul.


 Dans ce cas, cela signifie que le prix n’influence pas la demande.  Cela concerne essentiellement des prix de première nécessité.


3.    Comment calculer le chiffre d’affaires attendu en prenant en compte le phénomène d’élasticité des prix ?


Il faut ‘construire’ une situation de référence qui représente la situation qu’aurait connu l’entreprise en l’absence de sinistre.


Si, dans l’historique de l’activité, les prix unitaires varient très sensiblement, il faut évaluer la demande qu’aurait connu l’entreprise avec les prix unitaires observés pendant la période de perturbation.


En effet, si, pendant la période de référence, les prix unitaires sont faibles, la forte demande qui en résulte n’est pas représentative si, pendant la période de perturbation, les prix unitaires sont élevés :


 
Le tableau ci-dessous présente un exemple de calcul de la demande qui tient compte du phénomène de l’élasticité des prix :


-    pendant la période de référence, il a été réalisé 10 000 entrées pendant la période de référence, au prix de 10 € ;
-    pendant la période de perturbation, le prix augmente et est de 11 €, et il a été réalisé 8 000 entrées.


Compte tenu d’un ratio ‘élasticité’ de -50%, il aurait été réalisé, en l’absence de sinistre pendant la période de perturbation, 9 500 entrées, et non 10 000 entrées.
On notera que l’écart des 500 entrées représente 25% de la perte du chiffre d’affaires : 


 

4.    Les points de vigilance

 

Lorsque le chiffre d’affaires est calculé par le produit des quantités par les prix unitaires, il est important de vérifier la variabilité des prix unitaires.
Si cette variabilité est importante, il faut calculer le ratio ‘élasticité’ pour évaluer le chiffre d’affaires attendu pendant la période de perturbation en l’absence de sinistre.

Quelques astuces pour vérifier un coût de reconstitution de stock

14/06/2022

Quelques astuces pour vérifier un coût de reconstitution de stock

    Préambule

 

A la suite de la destruction d’un stock, l’expert doit évaluer la perte du stock en valeur de reconstitution de stock (sauf pour les marchandises prêtes à être livrées sur le quai de chargement avant sinistre qui sont valorisées en prix de vente).

 


Si la comptabilité générale répond à des normes précises, la comptabilité analytique est du ressort du contrôleur de gestion qui décide de la répartition des coûts dans l’entreprise.


L’expert est alors confronté à la difficulté de la ‘réconciliation’ des éléments de la comptabilité analytique avec la comptabilité générale.


Avant de ‘plonger’ dans l’architecture de la comptabilité analytique, certains contrôles de cohérence sont possibles à condition de disposer d’un échantillon représentatif.


C’est ce qui est exposé ci-après après un rappel préalable de certaines définitions et du principe du calcul de la méthode de coûts complets utilisée fréquemment en entreprise.

 

    Rappel de quelques définitions


Nous rappelons les définitions des marges et coûts utilisés fréquemment notamment dans les contrats d’assurance qui peuvent différer des dénominations de la comptabilité générale.


La marche Brute est égale aux Produits d’exploitation moins les achats matières premières, marchandises, emballages +/- variations de stocks, coûts transports achats et ventes. Elle s’apparente à la ‘Marge sur cout d’achat’ définie en comptabilité générale.


La Marge sur couts variables est égale à la marge brute définie ci-dessus, déduction faite des frais variables et semi variables.


La Marge nette est égale aux produits d’exploitation moins les charges d’exploitation ; elle est dénommée en comptabilité générale ‘Marge Brute’ ou ‘Résultat d’exploitation’.


Les produits finis (PF) sont des produits ayant atteint le stade ultime de fabrication dans l’entreprise. Ils sont donc vendus "tels quel.


Les produits semi-finis (SF) sont des produits ayant atteint un stade déterminé de la fabrication (et qui n’est pas le stade ultime) dans l'entreprise. Ces produits pourraient être vendables "tels que".


Les produits en cours (PEC) sont des produits n’ayant pas atteint un stade déterminé de la fabrication dans l'entreprise. Ils ne seraient pas vendables "tels quel".  


Prenons par exemple une entreprise de fabrication de vélos : 


    Le produit fini correspondrait au vélo complet (cadre + roues + selle + câblage de freins + chaîne + éclairage) 
    Les produits semi-finis (PSF) pourraient correspondre aux cadres ou aux roues par exemple. En effet, ils pourraient être vendables "tels que". 
    Les produits en cours (PEC) pourraient correspondre aux tubes seuls qui ne pourraient être vendables "tels que"


Le coût de reconstitution du stock est le coût de revient du produit qui comprend


    Les charges directes de fabrication
    Les charges indirectes de fabrication

 

    Sur la méthode des coûts complets pour valoriser les coûts de revient


Un coût de revient est une somme de charges. Il existe deux types de charges :


    Les charges directes
    Les charges indirectes


Une charge directe est une charge qui ne se rapporte qu’à un seul produit. Les achats de matières premières pour fabriquer un produit constituent, par exemple, une charge directe.


Une charge indirecte se rapporte à plusieurs produits. Les charges de personnel de la direction générale se rapportent à tous les produits fabriqués. Elles constituent une charge indirecte pour chacun des produits.


Cette charge indirecte doit alors être répartie entre chacun des produits.


Pour répartir les charges indirectes, il est établi un organigramme de fabrication avec les différents centres de traitement de l’entreprise. Par simplification, nous supposerons qu’il existe trois centres de traitement : ‘Achat’, ‘Production’ et ‘Distribution’.


Dans la réalité, il y a autant de centres de traitement que nécessaire (‘Atelier 1’, ‘Atelier 2’, ‘Administration’, etc…).


Les différentes charges indirectes sont ‘déversées’ dans les différents centres de traitement.


Il y a deux types de centre de traitements : les centres de traitement de production, et les centres auxiliaires comme la direction financière, la direction générale, etc..


Les charges des centres auxiliaires sont déversées dans un deuxième temps dans les centres de traitement de production. 


Pour chaque centre de traitement de production, il est défini une unité d’œuvre qui sert à affecter la part de charges indirectes du centre de traitement au produit concerné.


La somme charges directes et des charges indirectes de chaque centre de traitement relatives à chaque produit détermine ainsi le coût complet du produit. 


Le coût de revient de reconstitution du stock sera égale au coût complet du produit déduction faite des charges non engagées (frais de distribution, etc.).


Le schéma explicatif ci-dessous synthétise le processus décrit ci-dessus. Par souci de clarté, il n’est pas mentionné dans ce schéma les centres auxiliaires :

 



 

   

   Réconciliation de la décomposition des coûts de revient avec la comptabilité générale


L’expert se doit de vérifier la cohérence des éléments des coûts de revient avec ceux de la comptabilité générale.


S’il dispose d’une grille de prix de vente et de coût de revient pour les produits finis, il peut calculer le taux de marge brute et le taux de marge nette pour chacun de ces produits et comparer ces taux à ceux qui résultent de la comptabilité générale.

 

 

Sous réserve d’avoir un échantillonnage représentatif des produits finis, le calcul des taux de marge issus de la comptabilité générale et de la comptabilité analytique doivent être cohérents. 


Dans le cas contraire, l’expert s’interrogera sur les raisons des disparités observées avant de valider la grille des coûts qui lui est présentée.

 

    Vérification des coûts de reconstitution de stock


Pour mémoire, le coût de reconstitution du stock égal au coût de revient complet du produit moins les charges non engagées, de distribution notamment.


Si la grille des prix de revient est cohérente, l’expert pourra se baser sur celle-ci pour définir 


    les charges directes de fabrication
    les charges indirectes de fabrication engagées


L’expert pourra également vérifier les charges directes par sondage en vérifiant 


    les coûts d’achat de matières premières et d’emballage sur factures ;
    le taux horaire de main d’œuvre directe par le détail des charges prises en compte dans ce taux ;
    les factures de sous-traitance ;
    etc.
 


Cette vérification peut être faite aussi bien pour les produits finis que pour les produits semi-finis et les produits en cours.


    Les limites de ces contrôles de cohérence


Ces contrôles de cohérence ont toutefois une limite. 


En effet, les ratios mentionnés ci-dessus ne sont, bien entendu, pas identiques pour chacun des produits commercialisés par l’entreprise.


Certains produits sont plus rentables que d’autres, d’autres sont produits sur des lignes plus automatisées que d’autres, voire sont sous-traitées, etc...


Ces contrôles ne sont pertinents que si l’échantillonnage des produits valorisés est représentatif, statistiquement parlant, des produits commercialisés par l’entreprise.


En première approximation, un échantillonnage est représentatif si son effectif représente environ la racine carrée de l’effectif global.


Par exemple, si une entreprise commercialise 100 produits, l’échantillonnage représentatif devra avoir un effectif de √100,soit 10 produits.


L’expert pourra ainsi s’assurer que le nombre de produits à valoriser est représentatif avant de réaliser les contrôles de cohérence mentionnés supra.

 

    Synthèse


La question de la vérification des coûts de reconstitution de stock est une question fréquente qui porte sur des enjeux parfois conséquents.


Les données de la comptabilité générale ne permettent pas d’attester directement de la véracité de ces coûts, ce qui complique cette vérification.


Il est toujours possible de rentrer dans le détail de la décomposition des coûts de revient en vérifiant la concordance entre les données de la comptabilité générale et celle de la comptabilité analytique. Cette opération peut toutefois s’avérer chronophage.


Sans rentrer à ce niveau de détail, il est possible de vérifier la cohérence de la grille des coûts de revient complet avec la comptabilité générale, en comparant les marge brute et nette issues de la comptabilité générale et des grilles des coûts de revient.


Cette vérification doit être opérée sur un nombre représentatif de produit.


Si la grille des coûts de revient est cohérente, l’expert peut se baser sur cette grille pour valoriser les coûts de reconstitution du stock. 

 

 

 

 

 

 

Newsletter 1er semestre 2022

31/12/2021

Newsletter 1er semestre 2022

 

1.    Préambule


A la suite de la destruction d’un stock, l’expert doit évaluer la perte du stock en valeur de reconstitution de stock (sauf pour les marchandises prêtes à être livrées sur le quai de chargement avant sinistre qui sont valorisées en prix de vente).


L’expert dispose des données de la comptabilité générale et, souvent, d’une décomposition des prix de revient qui découle de la comptabilité analytique de l’entreprise.


Si la comptabilité générale répond à des normes précises, la comptabilité analytique est du ressort du contrôleur de gestion qui décide de la répartition des coûts dans l’entreprise.
L’expert est alors confronté à la difficulté de la ‘réconciliation’ des éléments de la comptabilité analytique avec la comptabilité générale.

 

2.    Qu’entend-on par « coût de reconstitution de stock » ?


Le coût de reconstitution du stock est égal au coût de revient du produit déduction faite des charges non engagées (frais de distribution, etc.). Et, Un coût de revient est une somme de charges, qui comprend :


-    Les charges directes
-    Les charges indirectes


Une charge directe est une charge qui ne se rapporte qu’à un seul produit. Les achats de matières premières pour fabriquer un produit constituent, par exemple, une charge directe.


Une charge indirecte se rapporte à plusieurs produits. Les charges de personnel de la direction générale se rapportent à tous les produits fabriqués. Elles constituent une charge indirecte pour chacun des produits.


Cette charge indirecte doit alors être répartie entre chacun des produits.


Le schéma explicatif ci-contre dessous illustre cette répartition en supposant qu’il existe dans l’entreprise trois centres de traitement : ‘Achat’, ‘Production’ et ‘Distribution’, dans lesquels sont ‘déversées’ les charges indirectes :

 

 .

 
Le coût de reconstitution du stock sera égal à la somme des charges directes (CD) et des charges indirectes réparties dans les centres ‘Achat’ (CDI1) et ‘Production’ (CDI2).


3.    Comment réconcilier la décomposition des prix coûts de revient avec la comptabilité générale ?


L’expert se doit de vérifier la cohérence des éléments des prix coûts de revient avec ceux de la comptabilité générale.


S’il dispose d’une grille de prix de vente et de coût de revient pour les produits finis, il peut calculer le taux de marge brute et le taux de marge nette pour chacun de ces produits et comparer ces taux à ceux qui résultent de la comptabilité générale :


 


4.    Quelques astuces pour vérifier le coût de reconstitution de stock


Si la grille des coûts de revient est cohérente, l’expert peut se baser sur cette grille pour valoriser les coûts de reconstitution du stock en retenant les charges directes et les charges indirectes engagées.


Il peut ensuite compléter son analyse en vérifiant que les ratios des différentes charges directes issus de la décomposition des coûts de revient sont cohérents avec ceux issus de la comptabilité générale.

 


 

 

5.    Les points de vigilance


L’expert cherchera à vérifier la cohérence de la grille des coûts de revient qui lui est présentée avec les données de la comptabilité générale en comparant la marge brute et la marge nette qui ressort de la grille des coûts de revient avec celles de la comptabilité générale.


Cette vérification ne sera pertinente que si l’échantillonnage des produits valorisés est représentatif, statistiquement parlant, des produits commercialisés par l’entreprise.

Newsletter 4ème trimestre 2021

30/09/2021

Newsletter 4ème trimestre 2021

Préambule

 

Le système judiciaire français est surchargé et les procédures d’expertise judiciaires s’allongent et sont de plus en plus coûteuses.


Des solutions alternatives se sont développées comme la médiation et la Procédure Participative.


Chantal Arens, Première présidente de la Cour de cassation, indique lors d’un interview avec la revue «Experts », qu’elle soutient l’essor de la Procédure Participative depuis 10 ans.


A la différence de la médiation conventionnelle, la Procédure Participative s'inscrit clairement dans l'optique d'une procédure judiciaire parfaitement encadrée. Son cadre juridique évolue depuis 10 ans et vient de connaitre une avancée importante.


La Procédure Participative permet l’intervention d’un technicien lorsque son expertise est nécessaire à la résolution du litige, comme, par exemple, pour l’évaluation des dommages immatériels.


Elle s’apparente dans ce cas à une expertise judiciaire où l’acte de désignation du technicien entre avocats ressemble à une ordonnance de référé et où le rapport du technicien aura désormais, depuis le 11 octobre 2021 , valeur de rapport d’expertise judiciaire !


L’article ci-dessous co-signé avec Maître Tomas-Bezer, qui s’implique avec conviction pour le développement de la CPP, présente les grandes lignes de cette CPP qui permet d’alléger les procédures judiciaires et de les rendre moins coûteuses.

 

L'objet de la procédure participative

 

 

A la différence de la médiation conventionnelle, qui fait appel à un tiers indépendant, la Procédure Participative s'inscrit clairement dans l'optique d'une procédure judiciaire.

Selon l'article 2062 du Code Civil, la Procédure Participative peut avoir deux objets :


    Soit la résolution amiable du différend
    Soit la mise en état du litige

 

Elle se déroule selon une procédure conventionnelle de recherche d'un accord, suivie, le cas échéant, par une procédure aux fins de jugement.


Elle peut aussi se dérouler dans le cadre de l'instance, aux fins de mise en état devant toute juridiction de l'ordre judiciaire, quelle que soit la procédure suivie.

 

La mise en oeuvre de la procédure participative

 

La mise en œuvre d'une Procédure Participative repose sur la conclusion d'une convention entre avocats.


L'article 2062 du Code Civil permet, aux parties d'établir une convention par laquelle les parties à un différend s'engagent à œuvrer conjointement et de bonne foi à la résolution amiable de leur différend ou à la mise en état de leur litige. Cette convention est conclue pour une durée déterminée.

 

Outre le terme que fixe cette convention, celle-ci doit préciser l’objet du différend, les pièces nécessaires à la résolution du litige et, si nécessaire, des actes contresignés par avocats.


Lorsque le recours à un technicien est nécessaire pour la résolution du litige, un acte de procédure contresigné par avocat est établi conjointement par les avocats des parties pour recourir à ce technicien dans un cadre similaire à celui d’une expertise judiciaire.


L’acte de procédure contresigné par avocats peut aussi être conclu en dehors d’une convention de procédure participative.

 

Le recours à un technicien dans la procédure participative

 

Le recours à un technicien obéit à des dispositions particulières prévues par les articles 1547 et suivants du Code de Procédure civile.


L’acte contresigné entre avocats permet de désigner le technicien et de fixer sa mission et sa rémunération.


Le technicien rempli sa mission de la même façon qu’il le fait dans un cadre judiciaire.

 

A la demande du technicien ou après avoir recueilli ses observations, les parties peuvent modifier la mission qui lui a été confiée ou confier une mission complémentaire à un autre technicien (Article 1551 CPC).

 

Selon l'Article 1551 les parties ont un devoir de collaboration avec le technicien.

 

Lorsque l'inertie d'une partie empêche le technicien de mener à bien sa mission, il a la possibilité de convoquer l'ensemble des parties en leur indiquant les diligences qu'il estime nécessaires. Si la partie ne défère pas à sa demande, le technicien poursuit sa mission à partir des éléments dont il dispose.

 

Tout tiers intéressé peut, avec l'accord des parties et du technicien, intervenir aux opérations menées par celui-ci. Le technicien l'informe alors qu'elles lui sont alors opposables (Art.1552 du CPC).

 

Le technicien joint à son rapport, si les parties et, le cas échéant, le tiers intervenant le demandent, leurs observations ou réclamations écrites et fait mention dans celui-ci des suites données à ces observations ou réclamations. (Art.1553 CPC)

 

A l'issue des opérations, le technicien remet un rapport écrit aux parties, et, le cas échéant, au tiers intervenant (Art.1554 CPC)

 

Depuis le 11 octobre 2021, ce rapport a valeur, devant les tribunaux, de rapport d’expertise judiciaire.

 

Maître Corinne Tomas-Bezer et Eric Alby, expert financier

Newsletter 3ème trimestre 2021

30/06/2021

Newsletter 3ème trimestre 2021

Préambule


La perte de chance peut être définie comme la disparition certaine du fait d’un tiers d’une éventualité favorable d’une chance d’obtenir un gain ou de la chance de limiter une perte.


L’indemnisation ne peut être égale à la totalité du gain manqué ou de la perte mais se limite à une somme correspondant à la seule chance perdue.


Pour évaluer le préjudice lié à une perte de chance, il faut :


-    Etablir le caractère certain de la perte de chance par son lien de causalité avec le préjudice ;
-    Evaluer la totalité du préjudice ;
-    Estimer la probabilité de réalisation de la chance.

 

Montrer la certitude de la perte de chance 


Il doit, dans un premier temps, être démontré le lien de causalité entre le fait du tiers qui serait à l’origine de la perte de chance et le préjudice.


Ce qui revient à dire que, pour écarter l’existence d’un préjudice de perte de chance, il faudra caractériser l’absence de toute probabilité d’obtenir un gain ou de limiter une perte.


Par exemple, il peut y avoir une perte de chance de conclure un nouveau contrat de vente en cas de bris de machine du fait d’un tiers qui rend impossible toute production.


La perte de chance sera certaine s’il est démontré que le produit, qui ne peut plus être fabriqué, est un produit courant qui répond à un besoin du marché, et que l’entreprise a toutes les capacités à intervenir sur ce marché.


En revanche, si l’entreprise doit disposer par exemple d’un agrément ou d’une qualification pour vendre ce produit et qu’elle ne dispose pas de ce document, le bris de machine qui empêche de produire ne peut alors constituer une perte de chance.


L’expertise devra apporter des éléments de faits pour démontrer que la disparition de l’éventualité favorable d’une chance du fait d’un tiers est en lien direct avec le préjudice allégué.

 

Evaluer la totalité du préjudice


Il faut ensuite évaluer la totalité du préjudice qu’aurait procuré la chance si celle-ci s’était réalisée.


Le préjudice peut être un gain perdu ou une perte.


On s’attachera à décrire et à quantifier la situation qui aurait celle qui se serait alors produite si la chance s’était réalisée.


Dans l’exemple ci-dessus de la perte de chance à la suite d’un bris de machine, on évaluera quelles sont les ventes potentielles du produit d’après les données du marché, celles de la concurrence, les échanges commerciaux, l’historique des ventes, etc..


Il sera ainsi caractérisé une situation de référence réaliste en fonction des éléments de faits qui auront été recueillis pour évaluer la totalité du préjudice si la chance s’était réalisée.

 

Estimer la probabilité de réalisation de la chance 


Il faut enfin évaluer la fraction du préjudice à affecter à la perte de chance.


L’approche quantitative est parfois possible lorsque nous disposons par exemple d’un taux de transformation d’un devis en contrat basé sur un historique.


L’approche qualitative sera retenue si nous ne disposons d’aucun moyen mathématique pour apprécier cette probabilité.


Dans l’exemple du bris de machine ci-dessus, ce n’est pas parce que l’entreprise aurait pu produire les pièces, qu’elle les aurait nécessairement vendues.


Il existe d’autres facteurs indépendamment du bris de machine qui concourent à la vente de ces pièces.


L’entreprise aura, par exemple, plus de chance de vendre ces pièces si les relations commerciales sont presque abouties et si des échantillons ont été produits et validés, que dans le cas contraire.


Pour évaluer la probabilité à retenir, on s’attachera à déterminer les autres facteurs qui concourent à la réalisation du gain manqué ou à la limitation de la perte, et à apprécier le poids de chacun de ces facteurs.

 

Synthèse


Pour établir un préjudice économique lié à une perte de chance, il doit être démontré le lien de causalité entre la perte de chance du fait du tiers et le préjudice. Ainsi, la perte de chance sera certaine.


Puis, il faut évaluer la totalité du préjudice constitué par le gain manqué ou la perte si la chance s’était réalisée.


Enfin, il faut évaluer la fraction du préjudice à affecter à la perte de chance en déterminant s’il existe d’autres facteurs qui peuvent concourir au préjudice. 

 

Pour aller plus loin


Etablir un arbre des causes entre le fait du tiers à l’origine de la perte de chance et le préjudice peut être éclairant.


Il permet d’établir le lien de causalité entre la perte de chance et le préjudice.


Il permet aussi d’apprécier le poids des autres facteurs concourant à la réalisation du préjudice et ainsi d’évaluer la fraction du préjudice à affecter à cette perte de chance.

 

Evaluation d'une Perte d'Exploitation suite à une cyber-attaque

12/05/2021

Evaluation d'une Perte d'Exploitation suite à une cyber-attaque

1.    Deux mots sur le risque cyber

 

L’ANSSI (Agence Nationale de Sécurité des Systèmes d’Information) écrit dans son document de synthèse du 1 mars 21 sur la menace cyber :


« La tendance à la hausse des attaques par rangonciel(1) à l’encontre d’organisations publiques et privées identifiées depuis 2018, s’est à nouveau confirmée en 2020, tant à l’échelle internationale que nationale. En 2020, l’ANSSI note une augmentation de 255% des signalements d’attaque par rangonciel par rapport à 2019. »


(1)    Le ransomware est un programme malveillant qui chiffre les fichiers.

Cela signifie qu’il modifie les fichiers ou les structures de fichiers de telle sorte qu’il n’est plus possible

de les lire ou de les utiliser à nouveau qu’en les rétablissant à leur état initial, c’est-à-dire qu’ils doivent être déchiffrés.

 

Face à ce nouveau risque, des assureurs proposent des contrats « cyber » avec un volet « Pertes d’Exploitation ».

 

La méthodologie de l’évaluation des dommages immatériels de ce type de sinistre présente bien évidemment des similitudes avec les sinistres « Pertes de données informatiques ». 

2.    Deux exemples qui illustrent l’intérêt d’une approche spécifique

 

Dans les deux exemples présentés ci-après, on constate une baisse significative du chiffre d’affaires suite à la perte de données informatiques qui résulte ou non d’une cyberattaque. 

 

2.1    Entreprise de construction

 

Une entreprise de construction gère plusieurs chantiers avec des équipes de terrain et un bureau d’étude qui réalise les plans.

 

Suite à cyber-attaque, cette entreprise perd toutes les données (notes de calcul, devis, plans, etc..) ; celles-ci ne peuvent être récupérées. Elles doivent être reconstituées.

 

Pendant la période de reconstitution des données, les chargés d’affaires sont mobilisés pour se rendre sur les chantiers et prendre les côtes nécessaires pour organiser les tâches à réaliser sur chantier ; ils réalisent, de ce fait, moins de devis.

 

Il est constaté une baisse du chiffre d’affaires dans les mois qui suivent la perte de données.

 

Après analyse, cette baisse est en fait peu liée à la perte de données car le rythme des devis a pu très vite reprendre. Par contre, la désorganisation du bureau d’études a entraîné une perte de productivité et des frais supplémentaires.

 

2.2    Société d’éditions de logiciels

 

Une société de fourniture et d’installation de logiciels et de matériels spécifiques perd la totalité de ses données suite à une cyber-attaque, ce qui entraîne un blackout total de la société.

 

La reconstitution du système d’information prend plusieurs semaines. 

 

Le processus de commande varie selon le type de client.

 

L’analyse des processus met en évidence que la partie développement de logiciel a été peu affectée ; par contre, la vente en négoce du matériel a été fortement perturbée et le mode dégradé du processus de commande a entraîné une réelle perte de ces commandes.

 

Après analyse, il a été retenu, pour l’évaluation de la perte d’exploitation, la baisse du carnet de commande et non la baisse du chiffre d’affaires qui était très nettement supérieure.

3.    Approche spécifique

 

L’évaluation de la perte du chiffre d’affaires n’est donc pas suffisante pour déterminer la perte d’exploitation. Il faut vérifier si cette perte est causale.

 

La perte des données informatiques stoppe la plupart ou la totalité des processus de l’entreprise : processus de prise de commande, processus de fabrication et de réalisation des prestations de service, et les processus administratifs. 

 

Pour identifier les processus impactés par le sinistre et déterminer l’impact de ces processus sur l’exploitation et les flux financiers, on s’attachera à :


-    Décrire les différents processus de l’entreprise 
-    Décrire le système d’information de l’entreprise
-    Etablir un planning de reconstitution des données
-    Déterminer les processus impactés et la durée de la perturbation
-    Evaluer l’impact financier de processus impactés.

 

Au préalable, on déterminera le type d’entreprise concernée pour avoir une vision globale de la perturbation générée par la perte de données.
 
3.1    Déterminer le type d’entreprise concernée

 

On précisera dans un premier temps le type d’entreprise concernée :


-    Entreprise de négoce (grande distribution, commerces, vente en ligne, …)
-    Entreprise de production (fabrication sur commande, fabrication sur stock, ...)
-    Entreprise de prestation de services (construction, transports, ...)
-    Entreprise de service public (hôpitaux, EPHAD, ...)

 

L’impact d’une cyber-attaque ne sera pas le même sur une entreprise de négoce que sur une entreprise de production.


Pour la première, l’arrêt d’activité pourra entraîner immédiatement une perte de chiffre d’affaires, notamment s’il s’agit de produits catalogue ; pour le deuxième, l’impact principal pourra être un retard de livraison et probablement des coûts supplémentaires de fabrication.


A noter aussi que l’impact sera différent pour une entreprise de fabrication sur commande et pour une entreprise de fabrication sur stock, ou en continu.


Pour une entreprise de transport, l’impact d’une cyber-attaque sur le chiffre d’affaires sera immédiat, alors que pour entreprise de construction, l’impact portera plus probablement sur l’organisation des chantiers.

3.2    Décrire les processus de l’entreprise

 

On ignorera les processus administratifs de l’entreprise qui n’ont pas de relation immédiate avec son activité.
 Les processus de l’entreprise qui peuvent être concernés par une perte de données informatiques sont essentiellement les suivants :

 


 

On s’attachera à décrire


-    Le processus de commande : commandes sur catalogue, commande sur devis, commande nécessitant une négociation, commande EDI, etc...
-    Le processus de fabrication : fabrication sur commande, sur stock, en continu, etc…
-    Le processus de réalisation des prestations de service

 

Il existe une très grande variété des prestations de services possibles :


o    Entreprises de construction
o    Entreprises de transport, de logistique, …
o    Cabinets d’avocats, d’expertise comptable, …
o    Hôtels, restaurants, 
o    Etc... 

 

On adaptera bien entendu la description du processus de réalisation de la prestation propre à l’entreprise concernée et on s’attachera à décrire quelles sont les informations nécessaires pour réaliser cette prestation.


Un hôtel pourra probablement continuer à fonctionner même s’il a perdu sa base de données clients. Par contre, un cabinet d’avocats ne pourra probablement plus rédiger de conclusions s’il n’a pas accès à ses pièces.

 

3.3    Décrire le système d’information (SI) de l’entreprise

 

Chaque entreprise a son système d’information, et la multiplication des solutions, outils, technologies, modes de consommation de l’informatique amplifie ce phénomène. Toutefois, pour éviter d’entrer dans les méandres technologiques, on peut résumer en écrivant qu’un SI se compose :


-    D’une infrastructure – serveurs, stockage, bases de données, réseaux, cloud, etc.
-    D’applications – généralement l’ERP est le cœur du SI, s’y greffent le CRM (clients), le SIRH (Système d'Information des Ressources Humaines), le marketing, les verticaux métiers, les développements spécifiques, les services, etc.
-    Des utilisateurs – plus précisément les outils et services du poste de travail jusqu’en mobilité

 

 

3.4    Etablir un planning de reconstitution des données

 

L’objectif de ce planning est de décrire à partir de quel moment les différentes fonctions de l’entreprise (service commercial, production, équipes de chantier, le bureau d’études, etc..) ont perdu et pu retrouver l’accès à leurs données pour retravailler en mode dégradé ou en mode normal.


On s’attachera notamment à repérer les dates de


-    Restauration de la messagerie,
-    Rétablissement de l’ERP
-    Rétablissement du CRM
-    Etc..

 


3.5    Décrire l’impact de la perte de données sur les processus de l’entreprise

 

Processus de prise de commande


L’impact sur le processus de commande dépendra du mode de prise de commande.


L’impact d’une perte de données sera probablement plus immédiat pour une entreprise qui commercialise des produits catalogue.

 

Pour les entreprises qui doivent établir des devis, la perturbation perdurera tant que les commerciaux n’ont pas retrouvé l’accès à la base de données. Un rattrapage est toutefois possible.  

 

Pour les entreprises dont la signature des marchés résulte d’une négociation client plus ou moins longue, la perturbation pourra perdurer tant que la base CRM n’est pas rétablie.

 

Pour les entreprises recevant les commandes par EDI (Echange de Données par Informatique), le processus de fabrication sera stoppé.

 

Processus de fabrication


Le processus de fabrication sera impacté notamment si la base des données techniques produit et l’application « gestion de production » sont altérées par la perte de données. Mais les impacts dépendront du mode de fabrication.


Pour les entreprises qui fabriquent sur commande, la perturbation sera directement corrélée à la perturbation du processus de prise de commande mentionnée supra.

 

Pour les entreprises qui fabriquent sur stock, l’arrêt de la fabrication n’arrêtent pas nécessairement l’arrêt de l’activité puisqu’il est éventuellement possible d’honorer les commandes à partir des stocks dès que l’entreprise pourra traiter les commandes.

 

Pour ces entreprises, la perte des données pourra cependant engendrer des frais supplémentaires de fabrication.

 

Pour les entreprises qui fabriquent en continu, il devra être déterminé si toute la production aurait été vendue et s’il y a un possible rattrapage de production, ce qui est une question classique pour un expert « Perte d’Exploitation ».

 

Processus de réalisation d’une prestation


 La nature des prestations est très variée. Comme indiqué supra, on s’attachera à déterminer quelles sont les informations manquantes suite à la perte de données pour la réalisation du processus de réalisation de la prestation.


Une entreprise de construction pourra probablement continuer ses chantiers en marche dégradée avec des solutions de « débrouillardise » pour récupérer les données nécessaires à poursuivre les chantiers. Cette marche dégradée pourra occasionner des frais supplémentaires.


Un hôtel pourra aussi probablement continuer à préparer les chambres pour les clients. 


Par contre, une entreprise de transport et de logistique sera probablement à l’arrêt car elle ne disposera probablement pas des données nécessaires pour le chargement des camions et l’organisation des tournées.

 

3.6    Evaluer l’impact financier

 

Pour chacune des perturbations décrites supra, on cherchera à déterminer le(s) flux financier(s) impactés et à borner dans le temps les perturbations en fonction du calendrier de reconstitution des données.


Le critère du chiffre d’affaires ne sera pas le critère privilégié ; il pourra toutefois être retenu notamment dans le cas des entreprises de ventes sur catalogues ou sur stock.

 

Le critère de perte du carnet de commande sera souvent plus pertinent, notamment lorsque l’entreprise fonctionne sur devis ou par marché.

 

Le critère des frais supplémentaires sera également retenu lorsque l’activité aura pu être poursuivi de manière dégradée.
 
4.    Synthèse

 

L’évaluation d’une perte d’exploitation suite à une perte de données informatiques ne doit pas se limiter à l’analyse de la perte du chiffre d’affaires, car celle-ci n’est pas nécessairement causale.

 

L’analyse des processus impactés par la perte de données (processus commande, processus fabrication et processus réalisation d’une prestation) dans l’entreprise facilite une vision claire des perturbations sur l’activité.


Un planning précis de la reconstitution du système d’information sera établi pour déterminer les périodes de perturbation de chacun des processus impactés.

 

Il sera ensuite défini les flux financiers pertinents pour mesurer l’impact (perte de commande, frais supplémentaires, perte de CA...).

 

L’évaluation de ces différents flux permettra ainsi d’évaluer la perte d’exploitation.

 

Cette méthodologie peut s’intituler


-    C comme comprendre les processus de l’entreprise
-    D comme décrire l’impact de la perte de données sur ces processus
-    E comme évaluer les conséquences financières de ces perturbations. 

Newsletter 2ème trimestre 2021

31/03/2021

Newsletter 2ème trimestre 2021

Préambule

 

La perte de chiffre d’affaires constatée après une cyber-attaque n’est pas nécessairement causale. L’analyse de l’impact de la perte des données sur les processus de l’entreprise permet de décrire les perturbations nées de cette perte et d’évaluer plus facilement les conséquences financières.


L’actualité récente montre une recrudescence des cyber-attaques et renchérit donc l’intérêt de cette approche. 


Un exemple


Une société de fourniture et d’installation de logiciel et de matériel spécifique perd la totalité de ses données suite à une cyber-attaque, ce qui entraîne un black-out total de la société. La reconstitution du système d’information prend plusieurs semaines. 


L’analyse des processus met en évidence que la partie développement de logiciel a été peu affectée ; par contre, la vente en négoce du matériel a été fortement perturbée et le mode dégradé du processus de commande a entraîné une réelle perte de ces commandes.


Après analyse, il a été retenu, pour l’évaluation de la perte d’exploitation, la baisse du carnet de commande et non la baisse du chiffre d’affaires qui était très nettement supérieure.


Approche spécifique 


La perte des données informatiques stoppe la plupart ou la totalité des processus de l’entreprise : processus de prise de commande, processus de fabrication et de réalisation des prestations de service. 


Pour identifier les processus impactés et décrire l’impact de la perte de données sur ces processus et les flux financiers, on s’attachera à :


-    Décrire les différents processus de l’entreprise 
-    Décrire le système d’information de l’entreprise
-    Déterminer les processus impactés et la durée de leur perturbation
-    Etablir un planning précis de reconstitution des données
-    Evaluer l’impact financier de processus impactés.


La description des processus de l’entreprise permettra de comprendre son fonctionnement et d’identifier les informations nécessaires aux différents services pour la réalisation de leur fonction.


Un service commercial aura besoin de la messagerie et de la base de données CRM pour établir des offres de prix par exemple.


La description du système d’information permettra de comprendre l’organisation de l’entreprise et de déterminer où se trouvent les informations nécessaires à ces différents services.

 

On s’attachera ensuite à décrire l’impact de la perte des données sur les différents processus de l’entreprise pour identifier les dysfonctionnements liés à celle-ci.


Le planning de la reconstitution du système d’information permettra de borner dans le temps les perturbations des différents processus.


Pour chacune de ces perturbations, on cherchera enfin à déterminer et à évaluer le(s) flux financier(s) impactés (carnet de commande, frais supplémentaires, chiffre d’affaires,…)


Nota : cette approche est détaillée dans un article « Evaluation d’une perte d’exploitation suite à une cyber-attaque » publié sur le site www.immatex.fr


Points de vigilance

 

Pour analyser une perte d’exploitation suite à une cyber-attaque, une méthode permet de vérifier le lien de causalité des pertes financières constatées avec la perte des données informatiques ; elle peut s’intituler C.D.E. :


-    C comme comprendre les processus de l’entreprise
-    D comme décrire l’impact de la perte de données sur ces processus
-    E comme évaluer les conséquences financières de ces perturbations. 

Pertes d’Exploitation : Situation de référence

04/03/2021

Pertes d’Exploitation : Situation de référence

Pour évaluer une perte d’exploitation, il faut comparer sur la période de perturbation :


-    la situation réelle de l’entreprise sinistrée
-    Avec une situation dite « de référence »


La définition de la situation de référence de l’entreprise sinistrée est donc un élément clé de l’évaluation.


Avant toute chose, il faut bien comprendre le cycle d’exploitation de l’entreprise sinistrée, le marché sur lequel elle opère et sa situation concurrentielle.
L’analyse de l’historique du chiffre d’affaires mensuels permet de voir l’évolution de l’activité.


Si l’environnement de l’entreprise n’a pas connu de faits marquants, on peut alors se contenter d’une analyse classique de l’évolution


-    Du chiffre d’affaires 12 mois pour une première approche de la tendance hors effet de saisonnalité
-    Des chiffres d’affaires 6 et 3 mois, pour voir s’il n’y a pas eu une inversion de la tendance dans les 6 ou 3 mois qui précèdent le sinistre.


Cette situation n’est cependant pas la plus courante :


•    On ne dispose pas toujours d’historique du chiffre d’affaires mensuels
•    Des faits marquants sont venus perturber l’historique de l’activité (crise des gilets jaunes, sinistres antérieurs, Covid 19, etc..)
•    Disparition ou arrivée d’un concurrent
•    L’activité est liée aux conditions climatiques (énergies renouvelables, activités touristiques, etc.)
•    L’activité est liée au vivant (production et transformation du lait, pêche, production de légumes, etc.)
•    Le prix unitaire de vente fluctue
•    Etc..

 

Nous allons voir quelques exemples qui illustre la nécessité d’une approche spécifique lorsque l’analyse de l’historique des chiffres d’affaires mensuels n’est pas pertinente.

 

Exemple 1 : Bateau de pêche 
Exemple 2 : Parc d’attraction
Exemple 3 : Fruitière
Exemple 4 : Agrandissement d’un supermarché


Exemple 1 : bateau de pêche


Un bateau de pêche subi une avarie et doit rester au port pendant plusieurs mois pour réparation.


Nous devons déterminer quelle aurait été la quantité de poissons pêchés et le cours de ce poisson pendant la période d’inactivité.
La quantité pêchée dépend des zones de pêche, de la technique et aussi de la compétence du patron de pêche.


Mais la quantité pêchée dépend aussi en partie des conditions météorologiques (coefficient des marées, orientation et force du vent, luminosité,).
On ne peut donc se baser uniquement sur l’historique des quantités pêchées par le chalutier sinistré.


Pour contourner cette difficulté, nous pouvons prendre, si nous les avons, les productions d’un chalutier de même tonnage pendant une période de référence et calculer le pourcentage des quantités pêchées du chalutier sinistré par rapport au chalutier de même tonnage.


Ce pourcentage caractérise la compétence du patron de pêche du chalutier sinistrée.


Puis nous pouvons appliquer ce pourcentage à la quantité pêchée par le chalutier de même tonnage pendant la période sinistrée pour calculer la quantité qui aurait été pêchée par le chalutier sinistré. 


Il peut ainsi être pris en compte les conditions météorologiques de la période sinistrée.


 

 

Exemple 2 : Parc d’attraction


Une attraction d’un parc est momentanément, mais durablement, indisponible du fait d’un sinistre.


Il est observé une baisse de la fréquentation du parc pendant la période de perturbation. Il faut déterminer quelle aurait été la fréquentation du parc en l’absence de sinistre.


Les conditions météorologiques influent sur le nombre d’entrées.


Pour vérifier s’il y a une réelle corrélation entre les données météorologiques et le nombre d’entrées visiteurs, nous pouvons calculer le coefficient de corrélation entre les données des précipitations annuelles enregistrées par Météo France sur la localité du parc et le nombre d’entrées annuelles.
 


Si ce coefficient de corrélation est proche de 1 ou -1, il y a une forte corrélation entre les précipitations annuelles et le nombre d’entrées visiteurs.


On peut alors calculer, par la méthode de la régression linéaire, le nombre d’entrées visiteurs pendant la période de perturbation en fonction des précipitations observées pendant cette période.


On raisonnera sur le nombre de visiteurs « désaisonnalisés » pour tenir compte de la saisonnalité.


L’analyse classique de l’historique du chiffre d’affaires n’est pas réellement pertinente pour définir la situation de référence pour les activités fortement corrélées aux données météorologiques.

 

Exemple 3 : Fruitière


Plusieurs étagères d’une cave d’affinage d’une fruitière à comté se sont effondrées, entraînant une diminution de la capacité d’affinage. 


De ce fait, la fruitière a fabriqué une quantité plus importante de comté moins affiné (3 et 6 mois) et une quantité plus faible de comté plus affiné (12, 18 et 24 mois).


Les prix du fromage fluctuent d’une année sur l’autre.


On ne peut se baser sur l’historique du chiffre d’affaires qui ne prends pas en compte les variations de prix et de quantités produites.


Pour évaluer le chiffre d’affaires qui aurait été réalisé en l’absence de sinistre, il faut déterminer


-    La production de fromage en quantité (tonnes)
-    L’affinage (pourcentage de chacune des familles de comtés 3, 6, 12, 18 mois, etc.)
-    Le prix de vente 


Le volume total de fromage en tonne est celui de l’ensemble des comtés produits tout confondus si on ne tient pas compte de la perte de poids lié à l’affinage. Nous considérerons cette perte de poids négligeable.


Il est impossible de définir précisément quel aurait été l’affinage réalisé en l’absence de sinistre. Celui-ci peut varier en fonction de la politique commerciale de la fruitière, de la capacité d’affinage de la cave. 


Sans autres éléments probants, il peut être fait l’hypothèse que la politique d’affinage est identique à celle de l’année précédente. Il sera alors retenu pour chaque durée d’affinage, le pourcentage affiné l’année précédente.

 


Et, il sera pris le prix réel de vente de chaque catégorie de l’année sinistrée.
 

Exemple 4 : Agrandissement d’une surface de vente


Un supermarché a réalisé d’importants travaux d’agrandissement. Suite à une sinistre « inondation », la veille de l’ouverture de cet agrandissement, le magasin est fermé pendant quelques semaines et reste perturbé une année.


Il faut déterminer quel aurait été le chiffre d’affaires à l’ouverture de l’agrandissement du magasin sans avoir d’historique.


Il peut être fait l’hypothèse que l’accroissement du chiffre d’affaires qu’aurait connu le magasin au moment du sinistre est celui que le magasin a connu un an après lorsque celui-ci aura retrouvé les conditions normales d’exploitation, soit en l’occurrence +20%. 


Et, il peut être apprécié graphiquement et contradictoirement la date à laquelle cette tendance s’incurve pour retrouver le niveau du chiffre d’affaire réalisé en n+2.

 

 

Comme dans l’exemple 2, on raisonnera sur le chiffre d’affaires désaisonnalisé pour tenir compte de la saisonnalité.


Synthèse


La définition de la situation de référence est une étape clé du processus d’évaluation de la perte d’exploitation.


L’analyse classique de l’évolution des chiffres d’affaires mensuels n’est pas toujours possible ou pertinente pour les diverses raisons évoquées ci-dessus.


Des alternatives existent pour définir la situation de référence qu’aurait connu l’entreprise.


L’approche par la méthode de la régression linéaire, tout comme la mesure de la corrélation entre l’activité et des facteurs extérieurs sont des alternatives possibles.


Bien comprendre le fonctionnement de l’entreprise sinistrée permet, avec un débat contradictoire et des outils adaptés, de convenir de la méthode qui permet d’évaluer au plus juste la situation qu’aurait connu l’entreprise en l’absence de sinistre.

La question des congés payés en période de chômage partiel et en période Covid

02/03/2021

La question des congés payés en période de chômage partiel et en période Covid

1.    Rappel des généralités en matière de congés payés


Tout salarié a droit chaque année à un congé payé à la charge de l’employeur. Chaque mois de travail effectif ouvre droit à un congé de 2,5 jours ouvrables. Pendant les congés, l’employeur verse au salarié une indemnité de congés payés.


Il appartient à l’employeur de prendre les mesures propres à assurer au salarié la possibilité d’exercer effectivement son droit à congé, et, en cas de contestation, de justifier qu’il a accompli à cette fin les diligences qui lui incombent légalement (information des salariés sur la période de prise de congé, communication de l’ordre des départs en congé, etc..).
La durée des droits à congés payés acquis par le salarié dépend du temps de travail effectif qu’il a effectué sur une période déterminée appelée « période de référence ». 


Le début de cette période de référence peut être fixé par un accord d’entreprise ou d’établissement ou, à défaut, une convention un accord de branche. A défaut d’accord, le point de départ de la période prise en compte pour le calcul du droit au congé est fixé au 1er juin de chaque année.


Pour la fixation des jours de congés, on distinguera les congés acquis avant le début de la période de référence et les congés en cours d’acquisition après le début de cette période de référence.


Pour les congés acquis, l’employeur peut fixer les règles de prises de congés après avoir consulté les instances représentatives du personnel et moyennent des délais de prévenance.


Pour les congés en cours, d’acquisition, l’employeur doit obtenir l’accord du salarié sur la fixation des dates de prise de congés.

 

2.    Mise en chômage partiel suite à un sinistre


Le dispositif d’activité partielle permet de prendre en charge les situations dans lesquelles les entreprises connaissent une baisse d’activité notamment pour sinistre (article R.5122-1 du code du travail). 


L’employeur doit adresser à la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (Direccte) du département où est implanté l’établissement une demande préalable d’autorisation d’activité partielle.


Pendant l’activité partielle, le salarié perçoit une indemnité compensatrice versée par l’employeur et ce dernier perçoit, en contrepartie, une indemnité de la Direccte sur la base des heures qu’il aura déclaré pour chaque salarié.


Par contre, l’employeur ne perçoit aucune indemnité de la Direccte lorsque son salarié prend ses congés.

 

3.    Acquisition des congés payés en période de chômage partiel


Selon l’article R5122-11 du code du Travail, la totalité des heures chômées est prise en compte pour le calcul des congés payés.


Le chômage partiel n’a donc aucune incidence sur les congés payés des salariés qui continuent à être acquis comme si le salarié était en activité normale.

 

4.    Mode de fixation des congés payés pendant la période de chômage partiel


Nous nous sommes interrogés sur le mode de fixation des congés payés acquis du personnel pendant une période de chômage partiel. 


Après vérification auprès d’un spécialiste en droit du travail collectif, le fait d’être en chômage partiel ne modifie pas le mode de fixation des congés payés.


L’employeur doit simplement, selon lui, engager une négociation avec les représentants du personnel sur les modalités de prise de congés pendant la période perturbée. 
Par contre, l’employeur ne peut forcer un salarié à prendre ses congés en cours d’acquisition sans l’accord du salarié.

 

5.    Comparaison des charges de personnel avec ou sans prise de congés payés pendant la période de chômage partiel


Comme indiqué supra, l’employeur a tout intérêt à ne pas mettre son personnel en congés payés lors de la période de chômage partiel pour percevoir l’indemnité de la Direccte la plus importante possible.


Par contre, si l’employeur ne fait pas prendre ses congés à son personne, pendant la période de chômage partiel, les charges de personnel restant à la charge de l’entreprise augmentent du montant de la provision des congés payés non pris. 


Dans l’exemple explicité infra, cette augmentation est de 25%.

 

6.    Particularité de la période COVID


Fixation des congés


Une ordonnance du 25 mars 2020 a assoupli les règles à appliquer pour la fixation des congés pour les entreprises concernées par la crise.


L’employeur est ainsi autorisé, dans la limite de 6 jours de congés et sous réserve de respecter un délai de prévenance qui ne peut être réduit à moins d’un jour franc :
-    à décider de la prise de jours de congés payés acquis par un salarié, y compris avant l’ouverture de la période au cours de laquelle ils ont normalement vocation à être pris,
-    à modifier unilatéralement les dates de prise de congés payés.

 

Aide aux congés payés


Par décret 2020-1787 du 30 décembre 2020, les entreprises, dont l’activité principale implique l’accueil du public bénéficient d’une aide exceptionnelle, au titre de congés payés pris par leurs salariés entre le 1er et le 31 janvier 2021 (date initialement fixée au 20 janvier, reportée au 31 janvier par le décret n° 2021-44 du 20 janvier 2021), lorsque les mesures légales, réglementaires ou individuelles prises pour faire face à la propagation de l’épidémie de covid-19 ont eu pour conséquence :


1° L’interdiction d’accueillir du public dans tout ou partie de l’établissement pendant une durée totale d’au moins 140 jours entre le 1er janvier et le 31 décembre 2020 ;
2° Ou une perte du chiffre d’affaires réalisé pendant les périodes où l’état d’urgence sanitaire a été déclaré d’au moins 90 % par rapport à celui réalisé au cours des mêmes périodes en 2019.


Cette aide est limitée à 10 jours de congés payés pris dans la période mentionnée ci-dessus ; elle n’est pas applicable aux congés payés indemnisés par les caisses de congés payés mentionnées à l’article L. 3141-32 du code du travail (par exemple, dans le secteur du spectacle).


Le montant de l'aide pour chaque salarié et par jour de congé payé pris dans la limite de dix jours, à 70 % de l'indemnité de congés prévue au II de l'article L. 3141-24 du code du travail, rapportée à un montant horaire et, limitée à 4,5 fois le taux horaire du salaire minimum interprofessionnel de croissance.


Le montant horaire ne peut être inférieur à 8,11 euros. Ce minimum n'est pas applicable dans les cas mentionnés au troisième alinéa de l'article R. 5122-18 du même code.
Le montant horaire est calculé en rapportant chaque jour de congé payé à la durée quotidienne de travail applicable au salarié ou, si cette durée ne peut être déterminée, à sept heures.

 

7.    Synthèse


En période de chômage partiel, l’employeur a la possibilité de fixer les périodes de congés payés selon les règles de consultation des représentants du personnel habituelles. 


S’il accorde des congés à son personnel pendant cette période, il diminue l’aide qu’il perçoit de la Direccte mais minimise les charges de personnel restant en définitive à sa charge.
Par contre, s’il décide de ne pas accorder de congés pendant cette période pour augmenter l’indemnité de la Direccte, il augmente ses charges de personnel de la provision des congés payés non pris. 


Il s’agit d’une décision d’entreprise dont le surcoût ne peut être à la charge de l’assureur PE.

 

En période COVID, l’état a mis en place une aide exceptionnelle pour prendre en charge 10 jours de congés payés selon les modalités du décret 2020-1787 du 30 décembre 2020. 


Cette aide constitue une économie de charges fixes qui vient en déduction du montant de la perte d’exploitation.

 

Annexe : Exemple de calcul des charges de personnel avec ou sans prise de congés pendant la période de chômage partiel 


Prenons l’exemple d’un salarié qui a un contrat de 100 heures au taux de 11€/hr, et qui prend 10 heures de congés dans le mois. 


En période normale, avec un taux de charges salariales de 22% par rapport au salaire brut et un taux de charges patronales de 42% par rapport au salaire brut, le salaire net est de 858 € et le coût salarial pour l’entreprise est de 1 562 €:

 

 

En période de chômage partiel, calculons les charges de personnel si l’employeur ne fait pas prendre de congés à son salarié pendant cette période.


Pendant le chômage partiel, la Direccte verse une indemnité à l’employeur à hauteur de 70% du salaire brut sur laquelle aucune cotisation n’est due. Cette indemnité est plafonnée. Depuis le 1er mars 2020, le plafond a été relevé à 8.03 €/hr.


Prenons l’hypothèse que l’employeur maintient la rémunération nette de son salarié à hauteur de 858 €. Il paiera donc les charges salariales et patronales sur 30% du salaire. Le coût salarial pour l’entreprise après intervention de la Direccte est de 160 €.


Comme aucun congé payé n’a été pris, en fin d’exercice, les comptes « charges pour congés payés n°6412000 et 6482000» s’incrémentent sur la base de 10 heures au taux de 15.62 €/hr (taux de 11€/hr + charges patronales), soit un montant de 156 €.


Ainsi, les charges de personnel pour ce salarié sont de 316 €

 

 

En période de chômage partiel, calculons maintenant le coût salarial si l’employeur fait prendre de congés à son salarié.


Dans ce cas, l’employeur déclarera que 90 heures à la Direccte (et non 100 heures).


L’employeur paira des charges sociales sur le complément de salaire versé pour garantir le salaire net de 858 € et sur l’indemnité de congés payés.
Par contre, les compte de charges « congés payés n°6412000 et 6482000 » ne seront pas incrémentés du fait des congés payés pris.


 
Les charges de personnel pour ce salarié seront ainsi de 254 €:

 


Ainsi si l’employeur ne fait pas prendre de congés payés à ses salariés pendant la période de chômage partiel, il perçoit une indemnité Direccte plus importante, mais le coût pour l’entreprise augmente du fait de l’incrémentation du compte de charges de congés payés.


Dans notre exemple, ce coût augmente de 25% :

 


 

 

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